“L’architecture et les espaces urbains produisent des images dans nos mémoires. Nous arpentons, fréquentons et existons dans ces lieux.
Ces édifices imprègnent nos imaginaires et ils fédèrent la mémoire collective. Leur inscription dans nos souvenirs se conjugue aux repères qu’ils forment dans l’environnement urbain.
Pendant cette résidence, j’ai souhaité interroger les images à Fort-de-France formées par nos la mémoire et m’éloigner des architectures iconiques de la ville, créoles ou modernes disposant déjà d’une iconographie, pour investir la sensibilité contenue dans les paquebots terrestres de l’avenue du général de Gaulle. Les édifices massifs qui la composent s’inscrivent en rupture avec les échelles ordinaires de la ville martiniquaise. Comment la mémoire restitue-t-elle alors ces formes étrangères au vocabulaire architectural traditionnel ? Depuis le Morne Pichevin jusqu’à la route de la Folie, les architectures de cette large artère ceinturent le sud du centre-ville.
Pour autant, elles semblent habiter leur lieu propre, à la fois attenantes à la ville et partie de son centre, à l’instar des images incertaines qu’elles forment dans nos mémoires.
Dans ce travail, j’ai cherché à remonter le temps, celui d’une organisation urbaine organisée autour d’un marécage puis par des canaux aujourd’hui substitués par ces masses bâties, et à l’anticiper.
Les images réalisées au cours de cette résidence reflètent une mémoire à venir, elles donnent vie à des vestiges du futur. Les volumes purs, les surfaces opaques et les reflets vitrés produits par ces édifices constituaient une invitation à s’incarner dans des effets d’apparition, de disparition et de fragmentation analogues à la formation de nos souvenirs. Dans ces dessins, les masses apparaissent par effacement de la surface pigmentée. On retire, on abstrait et pourtant on fait advenir. A l’image de nos souvenirs, certains détails disparaissent, s’étirent, s’imposent à la mémoire et aboutissent à ces fictions constructives où l’imagination s’empare de la réalité pour la recomposer. Elles devancent alors le temps et créent la mémoire architecturale de demain.”
Cécile Bourgade
Cécile Bourgade
27.10 au 08.11.23